Bonjour,
voici un inventaire de souvenirs qui me sont venus en parcourant vos présentations sur le forum. je me suis dit que chacun et chacune pourrait aussi ouvrir ses tiroirs à souvenirs .... Qu'en pensez-vous ? Une manie d'ateliers d'écriture sans nulle doute mais qui me rends curieuse de vos propres souvenirs !
Antoinette
Souvenirs à la charnière
- Je me souviens de la carte de téléphone dans le portefeuille
- je me souviens des cabines téléphoniques de Belleville
- je me souviens que l'une d'elle servait de maison à une femme brune très en colère
- je me souviens de ma première machine à écrire puis de la machine à écrire électronique puis du Mac sur lequel j'ai saisi mon mémoire
- je me souviens de ce petit bloc compact où des lignes de codes vertes s'inscrivaitent sur fond noir
- je me souviens de la découverte de la notion de sauvegarde après avoir perdu une bonne partie du texte
- je me souviens mal du minitel
- je me souviens de windows 3.1
- je me souviens de quelques uns des carnets utilisés avant les "docs" et les "fichiers"
- je me souviens que ce qui les relient est sans doute, encore et toujours, la question du rangement, de l'ordre, du classement
- je me souviens de l'apprentissage difficile de l'ordinateur dans les services où je travaillais
- je me souviens des boîtes d'archives
- je me souviens des matins de réveil avec la radio et sans Facebook
- je me souviens de matin en musique
- je me souviens du poids des dictionnaires
- du poids du sac dit à main mais en vérité à livres
- du poids des piles de vinyles puis de CD puis de la légèreté de la petite boite noire et plate, disque dur externe qui les contient tous
- je me souviens du premier portable prêté par le boulot, de sa masse, du choc lorsqu'il a été volé à l'arrache,
- je me souviens de l'attente des lettres aimées, du coup de fil aimé, bloquée chez moi, vérifiant que l'écouteur était bien posé sur son socle,
- Je me souviens du temps, plus dense, plus long, plus compact même s'il fuyait aussi parfois à l'intérieur des livres à tomes multiples
- je me souviens de la montée en pression des mails et de l'instauration progressive de l'instantané immédiat
- je me souviens des premiers Skype, puis, plus tard, des premiers Hangout de la magie des premiers, du soulagement des seconds qui évitaient des heures de train pour une réunion,
- je me souviens du développement des ordinateurs portables et de leur présence dans le TGV de 8h09 du lundi matin pour Paris et de l'affairement de leur propriétaire en costume gris ou noir
- je me souviens de Momo ou l'étrange histoire des voleurs de temps et de l'enfant qui rendit aux gens le temps qui leur avait été volé
- je me souviens de l'envahissement progressif et tenace de l'espace public par l'espace privé de chacun comme si le fait de parler au téléphone dans la rue créait magiquement une bulle à part
- je me souviens avoir mis du temps à comprendre que celui ou celle qui parlait seul(e) dans la rue en gesticulant, s'exclamant, s'arrêtant parfois pour être plus véhément n'était pas fou mais relié à son téléphone par un écouteur bluetooth,
- je me souviens de la découverte des revues en lignes, de la manne des blogs d'auteur et d'artistes, du premier blog tenté, du plaisir de jouer à cet endroit là,
- je me souviens de Google drive et du plaisir de pouvoir travailler à plusieurs et à distance
- je me souviens de la prise de conscience des traces numériques, de la surveillance simultanée, du Big Brother multiforme et commercial, du Capitalisme linguistique de F. Kaplan, de la notion de "révoltés de Panurge" pour souligner les pétitions indignées et incessantes que je signe bien pourtant encore
- je me souviens que je peux encore me souvenir de tout cela, faisant de moi et de bien d'autres des êtres à la charnière du passage numérique
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